Martin Scorsese a enfin reçu ses Oscars et Paolo, ça lui a fait quelque chose. D'abord parce qu'il a toujours considéré Scorsese comme un génie - le fait que Sharon Stone soit dix fois plus bandante dans «Casino» que dans «Basic Instinct» en est la preuve irréfutable, à ses yeux. Mais surtout, il se sent une sorte d'intimité secrète avec le papa des «Goodfellas», notamment depuis qu'il sait que c'est lui qui a réalisé en 1987 le clip de Robbie Robertson «Somewhere Down The Crazy River».
Objectivement, ledit clip n'arrive par à la cheville de «Raging Bull», mais pour Paolo, le redécouvrir, ç'a été une colossale madeleine audio-visuelle: il lui a suffi de réentendre la voix de Robertson crooner «Catch the blue train...» pour se retrouver vingt ans en arrière, dans cette chambre d'hôtel borgne à New York, où il avait passé trois semaines à pélos à faire des trucs hyperlubriques avec Anke... Ah! Le New York eighties! Vertigineux, déferlant, ultraglauque! Paolo revoyait tout: lui, jeune et très cool, Anke, vachement belle et insatibale, leurs orgies de nachos-margharita dans Tribeca, leurs kilos de joints, les groupes grunge au CBGB, Anke en train de vomir, lui en train de vomir, Anke en train de lui... Stoop! Et dire qu'il avait été assez naze à l'époque pour la plaquer comme le dernier des salauds...
Paolo a senti l'aiguillon de la nostalgie, mais aussi qu'il n'était pas seul. Pas de doute, Martin et Robbie lui faisaient signe: «T'as bientôt 40 ans, mais pas trop de pneu: t'as droit à une deuxième chance.»