24 février 2007

Un parfum de nénés

Marc a appris par hasard une histoire vraie qui l'a vachement remué: celle de ce pauvre gosse que sa mère oignait tous les jours avec une lotion corporelle «riche en huile essentielle de lavande». Résultat: ledit petit garçon s'était vu pousser des seins.

En apprenant cette sombre affaire d'oléo-hormone, Marc a été saisi d'angoisse. Est-ce que Julie faisait pareil avec Leo? Une inquiétude d'autant plus justifiée que Marc connaît (presque jusqu'à l'écœurement, pour être honnête) l'inclination ultra-lavandique de son épouse, qui a tendance à en mettre partout. Marc a donc passé fébrilement en revue les champs de déchaînement de Julie: les armoires (petits sachets), les chiottes (pots pourris), la buanderie (eau de repassage), la salle de bain (bougie), le garde-manger (miel)... Mais ouf! Pas de lotion ni de bain moussant à la lavande pour Leo: le torse de son fils serait sauf!

Marc a alors réalisé que le lavande-monopole avait épargné jusque là un pan majeur de ses fantasmes, alors que c'est précisément là que ses plus beaux effets restaient à déployer: le décolleté de Julie. Il a donc foncé à la droguerie pour acheter une lotion à la lavande et l'a offert à Julie en affirmant que c'était «chaudement recommandé par les spécialistes pour les soins du buste».

Depuis, Marc est aux aguets pour vivre en direct le moment où les seins de Julie boostés à l'hormone de Provence feront péter le soutif. Quant à l'odeur, il est devenu insatiable et s'est même porté volontaire pour le repassage. Histoire de sniffer son comptant de vapeur de nénés. 

17 février 2007

Le complot

A la rédaction du magazine féminin «Elle», on a pris une décision forte, on a franchi le pas, on a dit merde aux conventions. Via la rubrique culinaire, dont on sous-estime trop souvent le potentiel subversif et contestataire. Son dernier-né s'appelle «Recettes en séries» et il fait très fort. D'un côté, il libère les lectrices de leur culpabilité, en leur disant franco qu'elles ont le droit d'être elles-mêmes et de s'outer (parce que ouais, y'a rien de dégradant à être raide-dingues de Lost-Jack et du Dr Troy, d'ailleurs tout le monde l'est, et en plus, rien qu'entre nous, les filles, y'a pas plus tendance). De l'autre, il émancipe la lectrice-téléspectatrice qui s'assume en lui proposant des recettes de «plateaux-télé à thèmes» censés coller aux séries. Vous ne rêvez pas: «Elle», qui sinon se gargarise au gastro-raffinement frouze, porte au pinacle le dégoûtant emblème de la décadence fast-foodique ricaine et le déclare même «ultra-chic».

C'est presque un changement de paradigme et je devrais battre des mains de me sentir enfin comprise... si les plateaux-télé made in «Elle» n'étaient pas des variations sur le thème «la gamelle de mon clébard» - le «plateau-tôle» pour «Prison Break», par exemple, a l'air de dégueuli tout frais. Incroyable, d'autant plus que d'habitude, «Elle» la joue à fond food-design.

Conclusion: ce statement, c'est du pseudo, de la propagande de diététiciennes, qui veulent nous faire passer toute envie de plateau-télé. Alors avis aux sérioliques qui ne sont pas dupes: «The Shield» va vachement bien aux chips M-Budget paprika (les meilleures) et à la Ticino-binche Fine Food. 

10 février 2007

Fausses impressions

Cora n'en est à qu'à sa 30ème semaine de grossesse, mais son bébé menace déjà de débarquer. Verdict de son gynécologue: une semaine d'hostio pour des examens, suivie de cinq semaines de repos strict à la maison avec le droit de se lever «uniquement pour aller aux toilettes». Cora a failli éclater en sanglots en apprenant ce qui l'attendait, mais Sam lui a remonté le moral en lui faisant miroiter tous les DVD qu'elle allait pouvoir engloutir.

Une fois arrivée à la clinique, Cora l'a rappelé, totalement déprimée. «Parle au toubib, l'a-t-elle supplié. Promets-lui n'importe quoi, que tu feras le garde-chiourme, mais tire-moi d'ici. Je me sens si... diminuée...» Pour Sam, ça ne faisait pas un pli: Cora venait de réaliser que ces semaines de repos forcé seraient aussi des semaines sans relation sexuelle.

Il s'est donc senti légèrement humilié en se rendant compte que sa femme n'avait pas pensé une seule seconde à tout ce sexe mis entre parenthèse et qu'en réalité, ce qui la minait, c'était sa voisine de chambre: un superbe bidon mégatendu par des jumeaux, juché sur une silhouette irréellement svelte et ferme. Un vrai mannequin Cocoon, l'air outrageusement frais et reposé. «Sa première grossesse», Cora en aurait mis sa main au feu.

D'autant plus que le mannequin Cocoon l'avait écouté d'un air captivé quand Cora lui avait longuement expliqué qu'une grossesse, quand on a déjà un enfant, «ça n'a rien à voir». «Première grossesse» avait acquiescé d'un air admiratif. Avant de raconter sa vie à Cora et de lui parler... des quatre filles qu'elle avait déjà.

3 février 2007

Infection, baston, malédiction

Toute la semaine dernière, notre quotidien a eu l'allure dévastée d'un champ de bataille. Avec le trio chéri-enfant1-enfant2 canardé par les virus, et moi qui tentait d'endiguer le mal - paracétamol à la louche (jour et nuit), hectolitres d'eau salée (jour) et gouttes nasales (nuit), sirop expectorant (jour) et sirop antitussif (nuit)... Une vraie dèche. Heureusement, nous avions des sucreries et des DVD pour des traitements supplétifs: Smarties et «Age de glace 2» en boucle pour les enfants (jour), Toblerone et trilogie «Seigneur des Anneaux» pour le chéri (nuit).

Samedi, j'ai cru qu'on avait donné le tour et que j'allais enfin pouvoir me laver les cheveux. Quand tout à coup, la température de l'aîné a repris l'ascenceur et le chéri a couru s'enfermer aux toilettes, ahanant d'une voix faible à travers la porte: «Bide...foutu...» Traduction: «Chéri hors service STOP Pédiatre de garde avec aîné et cadet sous le bras pour ta pomme STOP Tant pis pour tes tifs STOP»

Après nous avoir abandonnés une bonne heure dans la salle d'attente entre trois briques Lego et quelques livres déchiquetés, l'assistante médicale du pédiatre de garde est venue nous chercher pour piquer le doigt de l'aîné(«Faut qu'on vérifie si c'est bactérien»). L'aîné s'est aussitôt mis à hurler. Je l'ai maintenu tant bien que mal alors que l'assistante médicale lui piquait le majeur en faisant le gros dos, parce que le cadet la rouait de coups en vociférant «Méchante! Méchante!»

Là, j'ai eu la sensation très nette que quelqu'un voulait ma peau.