Ça m’a pris un dimanche après-midi sur le tronçon Berne-Zurich, alors que j’avançais à pas de saucisson dans un embouteillage argovien tout en écoutant Johnny Cash qui chantait «One»: j’ai aperçu le panneau de sortie d’Oftringen et me suis souvenue d’un article qui évoquait le Wurstautomat de ladite bourgade. Un automate à saucisses qu’un boucher a eu le génie de planter devant son échoppe pour permettre aux «junkies de la saucisse» de venir s’approvisionner 24 heures sur 24. Et pas qu’en cervelas et en bratwurst. L’auteur du papier soulignait qu’on y trouve plein de créations subtiles, comme par exemple une exquise salsicia al limone. Ce Wurstautomat n’avait visiblement rien à voir avec son homologue ordinaire, le Selecta des quais de gare, qui semble décliner depuis la nuit des temps la même mélancolique triade: biberlis, capotes et clopes. C’est bon le porc, c’est bon le progrès! me suis-je dit.
J’ai donc quitté l’autoroute, me voyant déjà glisser de la monnaie dans cette caverne d’Ali Baba charcutière et rafler ma salsicia. Et puis peut-être qu’il y aurait des spécialités de saison, à l’ail des ours par exemple!!! J’ai taillé la route jusqu’au Wurstautomat, alors que Johnny Cash entonnait «Personal Jesus»: pas de doute, j’allais au-devant du sauveur!
Et là, grosse déconfiture. Le Wurstautomat était à moitié vide: dedans, il n’y avait plus que des bratwurst … et des clopes. Je me suis sentie affamée, trahie. Et j’ai fait demi-tour pendant que Johnny Cash croonait «Hurt» d’une voix déchirante.