Anke est infirmière et adore dépenser l’argent qu’elle n’a pas. Lasse des intrigues hospitalières, elle a décidé l’an dernier d’ouvrir un cabinet d’esthéticienne. Elle a loué à cet effet des locaux pas chers, s’est fait faire un joli logo gratuit par une copine graphiste. Et puis, elle a pété les plombs et euphoriquement dépensé la quasi-totalité de sa caisse de pension en équipements, en déco, en cartes de visites, en prospectus, en Smart porte-enseigne et surtout en consultations feng shui – histoire de placer tout ça sous les meilleurs auspices.Le jour de l’inauguration, flûte de champagne à la main, Anke rayonnait dans son cabinet flambant neuf et totalement feng shui. Sauf que les clientes ont presque toutes oublié de venir. Si bien qu’elle a fini par mettre la clé sous la porte et est redevenue infirmière.
Voici son bilan: «Je sais ce qui a foiré et ma conseillère feng shui est totalement d’accord. Niveau circulation d’énergies, les locaux étaient catastrophiques et le rayonnement du logo tellement négatif que ça bloquait le Chi. Bref, ça ne pouvait pas fonctionner.»
Le problème, ce n’est donc pas que son quartier était déjà maximalement saturé en esthéticiennes, ce n’est pas qu’elle n’avait pas de business plan, ce n’est pas sa phénoménale aptitude à se faire baratiner par les décorateurs, les imprimeurs, les garagistes et les consultants ésotériques: c’est qu’elle a commis l’impardonnable erreur de ne pas se ruiner totalement tout de suite. C’en était trop pour le Chi. Et il s’est vengé.